Je me suis noyé dans le magasin de vieux livres, avec le bonheur propre à tous ceux qui aiment l’odeur de l’encre et du papier. L'odeur des livres m'enivre. Surtout l'odeur des livres usés. Ceux qui ont déjà été vécu. Qui ont voyagé.
J’adore les déshabiller au hasard des pages et dévorer quelques lignes des yeux, avec ce bonheur intense de celui qui découvre des mots moribonds qui, au fur et à mesure de la lecture, prennent vie.
Comme ces livres inertes sur les étagères qu’on caresse du bout des doigts en rêvant aux histoires qu’ils enferment dans leur pages.
Et je pense à Lamartine :
Objets inanimés, avez-vous donc une âme
Qui s'attache à notre âme et la force d'aimer ?
et je me dis que oui. Je suis sûr que oui. Je veux croire que oui. Que tous ces livres ont tous une âme.
Parce qu'ils ont vécu ailleurs. Dans d'autres lieux. Dans d'autres vies. Souvent les seuls compagnons de solitude.
Un livre qu'on lit, pour se remplir le cœur d'images, a le don unique de meubler de sépia les solitudes sans les déranger dans leur silence.
Je me suis noyé joyeux dans le magasin de vieux livres. Et je suis heureux. D’un bonheur unique. D’un bonheur solitaire. Et j'oublie la solitude. Ma solitude.